jeudi 30 août 2012

Avant la chute de Fabrice Humbert aux éditions Le Passage





Lorsque leur père est assassiné par une milice pour avoir cultivé de la coca, Sonia et Norma, poussées par leur mère, décident de fuir la Colombie pour rejoindre les Etats-Unis. Le rêve américain en tête, les voilà sur la route de tous les dangers, celle de jeunes filles migrantes livrées à elles-même face à l'horreur des hommes.
Au Mexique, Fernando Urribal, sénateur, se retrouve dans une position bien peu confortable. Sa ville, Ciudad Juarez, connaît depuis quelques années une recrudescence de crimes et de trafics. Les cartels y font la loi et l'homme risque de payer pour ses choix politiques un peu douteux.
En France, Naadir vit dans une cité avec sa famille. Premier de sa classe, passionné de littérature, le garçon est en décalage avec les jeunes de son âge. Chez lui, brutalisé par l'un de ses frères et admiratif de l'autre, il observe la vie de la cité qui défile et sent qu'un danger les guettent.

On avait déjà compris grâce au titre que Fabrice Humbert allait nous entraîner dans une descente aux enfers violente et sans merci et bien ça se confirme en lisant ce roman. L'auteur passe d'un personnage et d'un pays à un autre et installe une atmosphère pesante qui n'inspire rien de bon pour la suite... Dès le départ, Fabrice Humbert nous expose la situation des différents personnages et leurs craintes, fondées, en l'avenir. On attend le moment où tout va basculer et sombrer définitivement, le moment où le destin réunira dans des circonstances tragiques les différents protagonistes de cette histoire. Avant la chute est un roman d'une grande force mais également d'une grande dureté, un roman qui remue les entrailles et qui donne envie de découvrir un peu plus le travail de Fabrice Humbert. 


mardi 28 août 2012

Chaux vive de Xavier Patier aux éditions La Table Ronde




Pascal, jeune étudiant en archéologie, a quitté le cocon familial pour s'installer à Bordeaux. Assidu en cours, le jeune homme regagne rapidement ses quartiers tous les soirs pour assister à la messe donnée dans sa petite église de rive droite. Habitué depuis tout petit à vivre simplement, Pascal se satisfait de peu, une chambre  sordide dans un quartier peu réputé, quelques bols de soupe en poudre et surtout la perspective de retourner   chez lui tous les week-end. Un soir, alors qu'il s'apprête à rentrer chez lui, il est accosté par Aubin, un homme de dix ans son aîné qui suit des cours dans la même faculté. Tous deux n'ont rien en commun, Aubin est volubile et charismatique, il mène une vie bourgeoise dans les quartiers huppés de Bordeaux, il est également un mari et un père. Très vite, il va prendre l'ascendant sur Pascal, l'entraîner avec lui dans toutes ses sorties et ses affaires douteuses.

Xavier Patier s'inspire d'une affaire criminelle dont nous avons tous entendu parler récemment mais dont je tairai le nom pour ménager un peu de suspense à cette histoire somme toute assez fadasse. Au-delà de cet évènement sordide dans lequel l'auteur puise des éléments pour construire son histoire, les thèmes qui sont abordés dans ce roman pourraient être assez intéressants. On y retrouve une question essentielle, celle des classes sociales: comment s'adapte t-on à à la rencontre d'une classe sociale différente de la nôtre? Dans quelle mesure est-il possible d'en changer? Quels enjeux se mettent en place? Et c'est tout naturellement que vient se juxtaposer la notion d'emprise ou de soumission à l'autre. Vous me direz, tout cela est passionnant et cela pourrait l'être effectivement. Malheureusement, Chaux vive manque peut-être un peu de subtilité entre son naïf-petit provincial-catholique-fils de fermiers-pauvre et son bourgeois-décadent-riche... Un peu plus de nuances n'aurait pas été pour me déplaire.

dimanche 26 août 2012

Le bonheur conjugal de Tahar Ben Jelloun aux éditions Gallimard




En 2000, à Casablanca, un homme victime d'un AVC est alité dans une chambre. Dépendant des autres pour le moindre geste, il est aidé dans son quotidien de deux hommes qu'il surnomme les jumeaux. Confronté  à l'immobilité, il se replonge dans ses souvenirs. Nous voilà en 1986 à Paris, l'homme a une trentaine d'années, il est peintre. Jusqu'alors, il se consacrait essentiellement à son travail et profitait de son charisme pour aligner les conquêtes. Mais cette année là, il rencontre sa future femme, une jeune fille de 10 ans sa cadette. Très rapidement, le couple s'installe dans une petite maison parisienne et vit ses deux plus belles années. Deux enfants et quelques années plus tard, leur relation se dégrade considérablement et c'est une longue descente aux enfers qui commence...

Reposant sur deux parties, le roman de Tahar Ben Jelloun  nous offre deux points de vue opposés sur l'histoire d'un couple. L'auteur s'attache, dans un premier temps à nous présenter ce mariage du côté du mari.  Au gré des souvenirs du peintre, nous revenons sur les évènements qu'il considère comme majeurs dans leur histoire mais également sur des détails insignifiants du quotidien. Puis, c'est au tour de la femme de proposer sa version des faits.  Et si quelques éléments semblent coïncider, nous nous retrouvons, la majeure partie du temps, face à deux interprétations contradictoires. On ne peut s'empêcher de prendre parti pour l'un, de s'enflammer contre l'autre mais l'auteur nous rattrape, nous bouscule, nous fait douter. 

Le bonheur conjugal est mon premier coup de coeur de cette rentrée littéraire 2012 (Pour la peine, je vais ressortir ma petite tortue de l'année dernière). Tout y est: la fluidité de l'écriture, l'intelligence de la construction du roman, la simplicité mais la profondeur du sujet traité, évitant la facilité et le manichéisme.  Alors sans hésiter, jetez-vous dessus pour éviter les déceptions liées à la profusion de romans qui va nous arriver au cours des deux prochains mois et profitez-en!





vendredi 24 août 2012

La vie de Régis de Sa Moreira aux éditions du Diable Vauvert




C'est très compliqué de vous parler du nouveau livre de Régis de Sa Moreira puisqu'il ne ressemble à aucun autre. La vie est un petit ovni littéraire, un exercice de style très intéressant. On y passe d'un personnage à un autre à chaque paragraphe, c'est-à-dire environ toutes les quatre lignes. Au départ c'est assez déstabilisant, ici, pas question de s'attacher aux personnages ni de suivre une histoire avec un début et une fin. Lire La vie ressemble plutôt à une sorte de jeu où l'on tente de deviner à l'avance par quel lien Régis de Sa Moreira parviendra à unir deux de ses personnages. Il s'agît parfois d'un sourire, d'un regard, parfois même d'une pensée ou d'une phrase échangée. On apprécie l'originalité mais on se lasse parfois et bien qu'il soit très court, c'est un livre à ne pas lire d'une traite au risque de le trouver un peu rébarbatif. On regrette également le côté un peu caricatural des personnages et des situations même si on se doute qu'en quatre lignes, il faut aller à l'essentiel pour pouvoir dérouler cette histoire. Malgré tout, on se prend au jeu et on se demande, une fois le livre terminé, si l'on va être capable de remonter le fil en sens inverse. Le plus simple finalement, c'est de le lire pour s'en faire une petite idée!



jeudi 23 août 2012

Le vase où meurt cette verveine de Frédérique Martin aux éditions Belfond




Mariés depuis plus de 50 ans et amoureux comme au premier jour, Zika et Joseph vont devoir être séparés. Pour eux qui n'ont jamais vécu l'un sans l'autre depuis leur rencontre, le monde va s'effondrer. Zika, qui a des problèmes de coeur, doit être prise en charge à proximité d'un hôpital, c'est leur fille Isabelle qui l'accueille chez elle à Paris. Alors que de son côté, Joseph va vivre chez leur fils Gauthier à Montfort. Aucun des deux enfants ne s'estime en mesure de prendre en charge le couple et les amoureux s'installent chacun de leur côté.  Joseph et Zika commencent à s'écrire, se racontent leur quotidien et voient le temps qui passe et qui ne les réunit pas. Ils découvrent leurs enfants tels qu'ils ne les connaissaient pas et voient leurs relations se dégrader jusqu'au jour où...

Avec son titre énigmatique et empreint d'une certaine langueur, on se demande de quoi va bien pouvoir nous parler ce roman. Le vase où meurt cette verveine est tout d'abord un roman d'amour, celui d'un couple qui, malgré les épreuves, est toujours plus uni. Frédérique Martin nous en parle avec beaucoup de tendresse et d'émotion. Mais c'est également le roman d'un désastre, celui que la vie et les relations humaines ont engendré. Le vase où meurt cette verveine est un grand choc, à la fois doux et violent, parfois même extrêmement brutal. On est ému par Zika et Joseph, on se bat à leurs côtés, on pleure avec eux, on souffre, sans imaginer à un seul moment dans quel état toute cette histoire va nous plonger. Un coup de coeur pour cette découverte faite dans le cadre de l'opération On vous lit tout organisée par Libfly et le Furet du Nord.




mercredi 22 août 2012

Swamplandia de Karen Russell aux éditions Albin Michel




Swamplandia, une petite île au large de la Floride est également un parc d'attractions tenu par la famille Bigtree. Dans cet îlot des Everglades, on cohabite avec les alligators et on réalise des numéros de grande voltige. Connu de tous et visité par de nombreux visiteurs, Swamplandia connaît la gloire jusqu'au décès d'Hilola Bigtree, la star de la famille et l'ouverture du Monde de l'obscur, un parc concurrent. Le chef Bigtree, veuf d'Hilola et père de trois enfants est clair: Swamplandia survivra et toute la famille devra s'y investir un maximum! Seulement, les enfants Bigtree ont une vision de l'avenir tout à fait différente. Kiwi, le grand frère, rêve de rejoindre le continent tandis qu'Osceola, la fille aînée semble être irrémédiablement attirée par les morts. Ava, la petite dernière, est la seule à répondre aux attentes de son père. Elle n'a qu'un seul objectif, sauver le parc et le souvenir de sa mère. 

Swamplandia nous plonge dans un univers à la fois magique et tragique qu'on n'a clairement pas l'habitude de lire. Karen Russell fait preuve d'une imagination débordante qui nous emporte dans un monde fantasmatique aux personnages et aux situations délirantes. On est directement plongé dans ce microcosme aux allures d'un film de Wes Andersen et ça, autant dire que c'est plus que positif. Les 100 premières pages s'avalent à toute allure, malheureusement, ça se tasse un peu par la suite en devenant assez répétitif, quel dommage! Swamplandia reste tout de même une très bonne découverte de par son originalité et le don qu'a Karen Russell pour nous raconter des histoires.